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Exposition virtuelle numérique : Solid Space Failed

Infos :
Virtual Dream Center
Visite : ici

Depuis sa création, le Virtual Dream Center s’est constitué en Topos atopoï, Lieu sans lieu de la virtualité, dont la fantasmagorie s’est agrandie à mesure que les artistes y ont inventé de nouvelles contrées.
Pour son exposition, Nathalie Novain a elle aussi pris acte de la nature particulière de cet espace virtuel, et ceci d’une manière singulière puisqu’elle a proposé d’y modéliser un lieu à la réalité elle-même instable. Le paysage qu’elle offre à son projet est en effet la reconstitution d’un site architectural conçu pour les foires internationales par Oscar Niemeyer à Tripoli au Liban en 1963, qui n’a jamais été achevé et dont des modules architecturaux s’érigent encore aujourd’hui pour former un environnement futuriste et quasi lunaire. Cet ensemble architectural inachevé et déserté, qui prend les allures d’une ruine à rebours du temps, se donne ainsi à voir dans le mystère de son absence de fonctionnalité. Sa présence fait pour cette raison l’effet d’un mirage pour celui qui en découvre les imposantes structures abstraites : dôme, arche, héliport et autres volumes aux formes sensuelles, caractéristiques du style de Niemeyer.
C’est bien la situation ambiguë de ce lieu qui a suscité l’intérêt de l’artiste, laquelle a voulu en faire le théâtre de l’apparition de quelques-unes de ses oeuvres transposées dans le Virtual Dream Center. Aussi a-t-elle, dans ce désert d’outre-monde modélisé dans l’espace virtuel, implanté un ensemble de sculptures géométriques, s’organisant selon le vocabulaire formel qui est le sien, fait de cônes, sphères et autres polyèdres jouant avec les volumes de l’architecte brésilien, dans la quasi absence de toute vie. Seul le spectateur en effet se rend témoin de ce désert sculptural en arpentant les étendues inanimées, où la chaleur s’abat sur les surfaces bétonnées érigées devant lui, dont certaines évoquent des météores abattus sur terre.
Mais l’apparente torpeur dans laquelle sont plongés ces lieux est néanmoins contrariée par quelques mouvements subreptices. Des ensembles de sculptures s’éveillent ici et là comme des automates, pour évoluer selon des principes d’expansion internes qui épuisent tous les possibles contenus en eux.
Plus loin, une tortue, animal quasi-minéral, avance avec lenteur en marge du domaine, comme un astre effectuant une révolution autour de son orbite, marquant pour nous un rythme temporel.
Le rythme est en effet un aspect essentiel de la proposition de l’artiste. Il en est question au niveau architectural, sculptural aussi bien que musical – l’ensemble des trois registres s’intriquant dans une chorégraphie précise – qui ne doit rien à l’arbitraire. Répétitions, variations sur la forme, jeux de coupes et d’alternance composent ainsi un ensemble unitaire à la géométrie raffinée, dont l’ambiance sonore aux modulations industrielles se veut l’écho, dans le sens là aussi rythmique, c’est-à-dire selon un déphasage, ou un écart. La composition musicale conçue par le musicien Klischee n’est en effet jamais l’illustration de cette métrique formelle, mais s’insinue dans le jeu – au sens de vide – laissé par les structures volumétriques.
Un des enjeux lui aussi majeur de la réflexion de Nathalie Novain consiste à exposer, en un moment cristallisé, l’ensemble des possibles offerts par une forme, si simple soit-elle, d’en épuiser le potentiel de développement, là où, paradoxalement, l’architecture de Niemeyer en était la suspension. Ce principe, qui est au cœur de sa pratique, se révèle en effet ici de manière dialectique. On sait que la virtus est le terme latin pour désigner la puissance : c’est à dire la capacité d’un acte à se réaliser ou non, à suspendre ou à actualiser une énergie. Ainsi, l’artiste ancre-t-elle son exposition dans une compréhension singulière de la virtualité en tant que rapport entre puissance et acte, entre la suspension et l’actualisation des possibles.
Elise Vandewalle, SOLID SPACE FAILED